Alors qu’à sa place, beaucoup auraient rejoint le monde des anonymes écornés par le système ou seraient retombés dans la criminalité, Nicolas Claux a fait le choix d’utiliser à bon escient ce qui l’a entraîné dans les abysses pour mieux s’en extraire et affirmer son existence sur un versant conquérant. Conscient d’être, par essence et par son acte criminel, un paria dans une société faite de codes moraux castrateurs et hypocrites, il a composé avec les éléments de sa propre réalité, animé par une volonté nietzschéenne constante de dépassement de soi.

L’intérêt pour le macabre est tantôt superficiel, cantonné en cela au simple divertissement véhiculé par la production littéraire ou cinématographique, tantôt enraciné chez l’être concerné. Il peut le détruire de l’intérieur ou bien au contraire, lui servir de défouloir viscéral aux vertus cathartiques permettant de canaliser sa noirceur pour la mettre au service du processus créatif. Peu de gens font l’expérience des deux. Nicolas Claux est de ceux-là. Après avoir franchi la ligne rouge, il a cherché à amadouer ses démons personnels profondément ancrés en lui. Il a appris à les aimer et à les respecter, tout en les nourrissant suffisamment pour trouver un équilibre au sein de son propre chaos. L’édification exacerbée de son personnage, le « vampire de Paris », fut certes une phase majeure dans sa réalisation mais présenta, au bout d’un moment, la menace qu’il ne puisse plus s’en défaire, au point de devenir sa seconde prison. Beaucoup se sont arrêtés à cette figure que certains considèrent, encore aujourd’hui, caricaturale et contrefaite. Pourtant, elle a été dépassée. En admettant chaque parcelle tourmentée de son âme et en suivant son propre code moral, Nicolas Claux est parvenu à devenir l’être humain qu’il voulait être et rien d’autre. C’est son cheminement dans l’existence qui, à mon sens, est réellement intéressant.

Presque dix ans après mon entrée dans l’univers de la murderabilia et de nombreuses correspondances avec les pires criminels de la seconde moitié du XXe siècle, je m’attelai à la rédaction de mon propre récit, fruit de cette incroyable démarche qui me fut inspirée par « Je Tue Donc Je Suis, écrits et dessins de serial killers ».