Entretien avec Etienne Ruhaud
Publié dans Correspondances, interviews
J’aime penser que la vraie réalité est dénaturée, tronquée par l’ensemble de nos perceptions sensorielles. En effet, il est admis scientifiquement que notre rapport avec la réalité et la façon dont elle est appréhendée diffèrent beaucoup selon les individus. Le monde de la psyché (inconscient) est peut-être plus authentique, plus entier et moins soumis à la dictature de nos sens, ou encore de notre ego, qui nous induisent parfois en erreur sur l’interprétation que nous nous faisons du monde qui nous entoure et dont nous faisons partie.
E.R. : Ton œuvre demeure assez sombre, marquée par la mort, l’angoisse. L’art est-il pour toi un exutoire ? Peut-il rendre heureux ?
D.B. : En effet, je suis un anxieux de nature. L’Art est pour moi non seulement un exutoire qui me permet d’évacuer mes angoisses mais aussi un outil pour tenter comprendre l’émotionnel et le matérialiser, offrir un regard différent sur le monde. En quelque sorte, c’est une manière de les rendre solide pour mieux les expulser. C’est un moyen de rendre esthétique ou beau quelque chose d’abstrait, de le communiquer au monde pour qu’il existe dans le regard de l’autre et que ce dernier puisse faire part de ses impressions.
Cela me permet d’appréhender mes œuvres d’une manière différente, en prenant compte de l’avis de ceux qui les contemplent et me font des retours. On me fait souvent remarquer qu’il y a dans mes créations quelque chose de Lovecraftien. C’est pour moi le compliment le plus honorifique que l’on puisse me faire. Toutefois, je ne cherche nullement à mettre en image l’univers de Lovecraft mais bel et bien le mien.